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1

La Légende de L'Avenir


J'avais un Secret formidable.
Ou un Trésor.
C'était comme à la fin d'une ère.
Je savais ce qui délivrerait la Terre de ses millénaires de plomb ou de fer : la Victoire sur la Mort, car c'est la Mort qui règne, nous sommes des morts debout ou en suspens, et c'est la Mort qui fait toutes nos lois et tous nos catéchismes, scientifiques ou religieux, en fonction de ce qu'elle est — et que nous ne sommes pas. Ou pas encore. Nous sommes le produit des fossiles avec quelque chose dedans que nous ne connaissons pas. Ou pas encore. Nous sommes à la dernière étape d'une Évolution des morts, qui renaissent sans fin pour trouver ce qu'ils sont. La vie n'a jamais été encore — elle est quelque part dedans ou dessous, et c'est elle qui pousse et pousse sans trêve, et sans pitié, pour nous obliger à trouver, dé-couvrir ce qui est , dedans ou dessous, sans catéchisme, sans paradis célestes ni supermachines qui trouveront pour nous ce que nous n'avons pas trouvé, qui recouvriront d'une nouvelle couche préhistorique et animale ce qui est là, dedans ou dessous. L'Histoire n'a pas commencé, ou pas encore. L'Homme n'a pas commencé : nous sommes des hominiens scientifiques ou religieux en transition — interminable transition vers ce que nous devons être : une autre espèce, nouvelle et inconnue, humaine vraiment, qui ne sera plus le produit des fossiles améliorés et des cimetières grandissants, comme s'il n'y avait plus que cela qui grandissait sur notre planète mortelle qui s'ingénie à améliorer la Mort au lieu de trouver ce qui est là, dedans ou dessous — le Pouvoir qui changerait tout, homme compris.

« L'homme est un être de transition »

disait Sri Aurobindo au début de ce siècle.

« Le salut est physique »

disait Mère au milieu de ce siècle.
Et nous allons de catastrophe en catastrophe, et de ruines en ruines à travers les millénaires, pour nous obliger à ouvrir la seule Porte que nous n'avons pas ouverte, dedans ou dessous. Comme si cette espèce-là, ou cette civilisation-là, n'avait pas trouvé la clef qui ouvrirait tout et changerait tout, et encore une autre espèce et encore une autre « civilisation », et encore des ruines... à perpétuité? Mais il y a quelque chose qui pousse et pousse, dessous et dedans — implacablement. Il n'y a rien de plus implacable que l'Évolution ou qu'une jeune pousse sous la forêt, qui veut produire son Arbre, et qui mourra autant de fois qu'il faut et se servira de tous les détritus, toutes les décompositions des vieilles souches mortes pour jaillir enfin au grand jour et à l'espace libre, et produire son unique fleur.
Faudra-t-il encore des morts et des cimetières grandissants pour trouver ce que nous sommes et notre propre Pouvoir? Mais notre planète menace de n'être plus qu'un grand Cimetière, avec des gnomes ou super-gnomes produits de leurs tripotages chimiques et génétiques. Mais où est le « gène » là-dedans, ou là-dessous, le ce-qui-engendre — c'est la Mort qui s'engendre elle-même pour pouvoir vivre et faire des petits morts-vivants... à perpétuité?
Avons-nous encore le temps de produire une autre espèce — et quelle espèce qui ne sera plus issue des vieux fossiles ? par quels moyens ? La catastrophe encore?
Mais celle-ci menace d'être planétaire.
Nous sommes à la fin d'une ère. Et justement.


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2

Le Fil du Destin

Il y a une Légende dans la catastrophe même et dans le ventre même du diable de la vieille Mort — mais il faut aller là et toucher le ressort puissant.
L'Avenir est loin derrière nous, si loin qu'il est comme perdu et englouti par tant d'espèces derrière qui ont laissé indélébilement sur nous leur triste empreinte mortelle.
Alors un choc radical qui défonce tout — ou qui ouvre tout.
J'avais vingt ans tout juste lorsque je suis entré dans les camps de la mort — j'en suis sorti comme un mort, vivant quand même.
L'« homme », c'était NON, c'était détruit à jamais. C'était un néant de Mensonge prétentieux. Et pourtant, un jour, sur une place d'appel sinistre, j'ai basculé dans un trou de Tendresse inimaginable et envahi par une Joie jamais connue — ça sortait d'un abîme noir sidérant et impérieux, sous mes pieds. Si je n'avais pas craint d'être fou et passé à la schlague, j'aurais chanté.
Comme si le premier mot de la joie, c'était le chant.
Par un de ces « hasards » miraculeux — et alors là on touche le fil du Destin, mais un fil si loin et si profond qu'il est comme un autre abîme —, onze mois exactement après la sortie de cet Enfer, j'ai été conduit devant Sri Aurobindo et Mère à Pondichéry. C'était un 24 avril 1946. Et toute ma vie a basculé dans un « Autre Chose » incompréhensible, et insupportable, comme un autre genre de catastrophe à l'envers. Et ce regard de Mère comme une Tendresse béante qui s'en allait si loin, si loin dans je ne sais quel abîme déchiré et déchirant. Et ce regard de Sri Aurobindo, si vaste, si loin, ou de si loin, et si doux comme mon infini de vieux marin qui s'en va dans le Bleu et pour toujours, ou qui voudrait
s'engloutir là et pour toujours. J'étais devant Celui qui disait : « L'homme est un être de transition. » Alors OUI ! Oh ! ce oui-là qui sortait de mes abîmes déchirés et de tous mes Enfers à vif qui semblaient remonter de si loin aussi.
La Transition, comment?
Par un autre « hasard », peu de temps après, je tombe sur un disciple qui me dit : « Vous savez, les "rêves", ça a un sens. » Un sens?... Tout était si insensé que je me fichais de tout, ou que j'étais prêt à tout. Tout, mais pas ça que je vivais ou survivais. J'étais le restant d'un anthropoïde occidental complètement matérialiste, et surtout anti-religieux—je détestais les religions et les dogmes de toutes sortes, ce Dieu de la mort, quoi? Alors, ce soir-là, je me suis dit : «Bon, voyons ce que c'est.» Je voulais toujours voir les choses à nu et sans masque — les masques étaient tombés une fois pour toutes devant certaines piles de cadavres torturés. Et voici ce que j'ai vu cette nuit-là:

J'étais dans une citadelle moyenâgeuse assez sombre — une citadelle occidentale, c'était en Occident — et je descendais une ruelle étroite pavée d'énormes dalles. Je les vois encore, solides, polies, inégales, et de hauts murs qui avaient l'air de pencher sur moi avec des petits balcons en fer forgé. Je marchais là, tout petit, au milieu d'une foule obscure et étrangère. C'était cette foule qui avait une odeur. Une foule étrangement silencieuse : chaque être était tapi dans le silence. Et une odeur de souterrain. Je me voyais au milieu d'eux, très petit, presque sombre, comme vu par-dessus mes épaules. J'allais vers une porte, je savais qu'il y avait une porte en bas*. Mais à mesure que j'avançais, j'avais le sentiment que je n'étais pas habillé comme il fallait, que je ne faisais pas ce qu'il fallait, que je n'étais pas comme eux, que j'étais d'un autre lieu ou d'un autre temps, peut-être, une sorte d'intrus, et que Von me regardait. Et ces regards-là devenaient de plus en plus menaçants, agressifs. Et plus je sentais mon étran-geté, plus leur hostilité montait. Elle montait de partout, même des murs, des pierres — un monde de pierre. Et je ne savais pas ce qu'il fallait faire ; je cherchais désespérément le geste, la parole : je me courbais, je rasais les murs, je m'emplissais de gris—rien ne servait.

* Je me souviens encore, j'étais du côté droit de la ruelle en descendant vers la porte.

J'étais repéré par cette foule muette. Et mon malaise grandissait, grandissait, devenait presque intolérable, étouffant, comme si mes vêtements étaient faux, odieusement faux, mon visage aussi, ma couleur — j'étais pris dans une espèce de gnome-moi, qui était moi quand même, et je n'arrivais pas à trouver quelque chose qui m'aille, je n'arrivais pas à faire comme eux, je ne savais pas le mot, je ne savais pas les gestes, tout pesait. Et puis les policiers allaient venir, c'est sûr, et je n'avais pas de passeport non plus, je n'avais rien, j'étais enfermé, prisonnier dans cette horrible forteresse de pierre... Et soudain, jailli je ne sais d'où, au milieu de la ruelle, un énorme cheval blanc est apparu — blanc, lumineux, oh ! un animal merveilleux, et haut, si haut qu'il touchait presque les murs et dominait la foule. Un poitrail gigantesque, formidable. Et avant même que j'aie pu comprendre ce qui se passait, je me suis retrouvé sur son dos, galopant : un galop fantastique. Un galop de dieu, tout s'ouvrait devant moi : la foule, les portes, les gardes, rien ne résistait. Et puis le large tout d'un coup, la liberté, l'air pur— tous les rhododendrons de l'Himalaya dans un souffle. J'en avais plein les poumons, je me dilatais, m'élargissais, m'allumais presque — je reprenais ma taille et ma couleur. Une libération. Je sens encore cette crinière blanche dans mes mains, les flancs chauds contre mes cuisses, et puis le vent qui cingle ma figure, l'allégresse dans mes veines. Emporté par une puissance triomphante, irrésistible... Nous entrions dans une forêt.

C'était en 1946. C'était l'annonce de tout le chemin qui allait suivre. Ma première vision. Mais ce que je ne comprenais pas alors, c'est que cette citadelle moyenâgeuse représentait non seulement le Moyen Âge (religieux) du XIe siècle, mais le Moyen Âge (scientifique) du XXe siècle. C'est-à-dire tout l'Occident. Et je galopais comme un fou ivre de joie sur le dos de ce formidable cheval blanc... Ce que je ne savais pas non plus à l'époque, c'est que ce cheval blanc, dans la tradition indienne, est la monture de Kalki, le dernier « avatar », celui qui vient à la fin du cycle humain pour « changer la loi».
Alors OUI ! cette loi de la Mort et du Mensonge régnant, pour instaurer le règne de la Vie Divine et de l'Homme Vrai. Oui et oui ! c'était à tout jamais inscrit et vibrant dans cet abîme cellulaire qui avait béé sous mes pieds au milieu même des Enfers.
Une autre Loi, ou la mort, et de ma propre main cette fois-ci.

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3

Anubis


Mais la Légende continue... toujours plus loin, plus en arrière. Plus intense.
Après bien des péripéties sur bien des chemins dangereux où j'étais une perpétuelle question de la vie qui regarde la mort et qui malgré tout se sentait tirée par une Énigme impérieuse, ce « là-bas » en Inde où il y avait Celui-là au grand regard et cette Mère de Tendresse qui me regardait comme du fond d'un Inconnu — comme un défi au fond de « tout ça »... Mais toujours ma vieille horreur de ces Ashrams, ces collectivités au milieu desquelles je me sentais un étranger, comme un vieil ours
d'aucun pôle — au fond, comme un animal de nulle part. Ce « nulle part », c'était peut-être bien mon énigme.
Et puis j'ai sauté le pas.
Je suis revenu en Inde, j'avais trente ans tout juste.
Pas à pas, méfiants et tiraillants — mais j'adore les défis —, je suis revenu à Pondichéry... Elle était là, toute blanche, avec je ne sais quel rayon qui perçait au fond et soulevait d'étranges remous, comme une envie d'aimer et de fuir et de plonger là quand même, et aussi une vieille forteresse de « moi » qui se défendait. Je voulais SAVOIR, c'était comme une soif après des siècles de désert. Et puis j'ai fondu.
Pendant vingt ans presque je suis devenu son confident jusqu'à ce 1973 fatidique où j'allais culbuter dans l'ultime Défi et triturer, empoigner l'Énigme à pleines mains et à plein corps, tout seul une fois de plus au milieu de la foule hostile, au cœur de la Légende éternelle et du Secret qui changerait tout. Pendant presque vingt ans j'ai suivi et noté le fabuleux cheminement de Mère — toute seule, Elle aussi, après le départ de Sri Aurobindo —, son expérience physique, corporelle, dans l'Avenir de la Terre, dans la fabrication de cette prochaine espèce, qui ne sera pas super-humaine mais Autre Chose radicalement — peut-être l'Homme vrai, enfin et au bout de tout : ce que Sri Aurobindo appelait « la transformation ». Ce fabuleux document vécu à tâtons dans la Nuit du monde — une Nuit grandissante et étranglante, comme à la fin d'une ère—, Mère l'appelait son Agenda. Le processus de la prochaine Évolution, qui ne sera plus l'évolution des fossiles ni des gnomes électroniques qui n'ont rien découvert, que de la mort et la mécanique de la Mort.
La dé-couverte de Mère était dangereuse pour tout ce monde de Mensonge : ils allaient être démasqués et mis à nu et nuls dans leur débâcle. Elle l'a payé de sa vie, poussée dans la tombe par ses propres disciples.
Mais entre-temps le fil de la grande Légende se renouait. Un jour de 1960, le jour de mes trente-sept ans exactement, lors d'une de nos rencontres, Mère est entrée en méditation, et Elle a vu:

« Dès que la méditation a commencé, j'ai vu des scènes de l'Egypte ancienne, tout à fait familières. Et toi, tu étais un peu différent, mais tout de même très semblable... La première chose que j'ai vue, c'est leur dieu qui a une tête comme ça (geste comme un museau), avec un soleil au-dessus de la tête. Une tête d'animal, une tête foncée avec... Je connais TRÈS BIEN, mais je ne sais pas quel animal exactement. Il y en a une, c'est l'épervier, n'est-ce pas, et l'autre c'est une tête... (Mère refait le même geste).
— Comme un chacal ?
— Comme un chacal, oui, comme ça. Oui, c'était ça. Avec une espèce de lyre au-dessus de la tête, et puis un soleil. »


Anubis ! le dieu de la nécropole, celui qui aida Isis, la Grande-Mère — devenue Dèmèter chez les Grecs — à reconstituer le corps de son époux, Osiris, qui avait été tué et dépecé par son frère Seth. Isis, aidée d'Anubis, réussit à le ressusciter grâce à certains rites spéciaux.
Nous ne sommes pas loin de la grande légende de Sri Aurobindo: Savitri et Satyavane. Savitri qui veut tirer de la tombe Satyavane (ou disons Sri Aurobindo lui-même) mort dans la forêt.
Et Mère, de reprendre la description de sa vision:

«Et ce dieu (Anubis) était très étroitement en relation avec toi, presque comme si vous étiez fondus : à la fois tu étais comme un prêtre du sacrifice, et en même temps, il rentrait en toi.
«Et ça a duré. Mais il y avait beaucoup-beaucoup de choses — des vieilles choses que je connais —, et certainement une relation TRÈS ÉTROITE que nous avons eue ensemble dans les temps d'Egypte, à Thèbes.»


Et tout à coup je me suis souvenu de cette émouvante visite à Thèbes, avant de venir en Inde : je touchais tout avec une émotion indicible, les murs, les sables, comme si je voulais gratter-gratter là-dessous et savoir ce qui vibrait si étrangement. C'était du temps de la reine Néfertiti et d'Akhenaton. Moi, l'anthropoïde, j'étais ébloui par quelque chose d'inconnu qui était quand même connu d'une certaine façon, une incompréhensible compréhension.
Et Mère continue son expérience :

«Mais c'était intéressant, alors j'ai commencé à regarder, et j'ai VÉCU la scène, toutes sortes de scènes : des scènes d'initiation, de culte, etc... pendant longtemps. Et alors cette image d'Anubis s'est levée et il est descendu une lumière beaucoup plus forte, dans un silence admirable... Et c'est descendu d'une façon tout à fait hiératique et (comment dire ?) égyptienne de caractère — très occulte, et très-très défini, très précis. Comme un bloc de silence qui descendait. Et ça descendait, ça descendait, en flots. Et c'est venu avec une joie dedans ! oh !...»

Tout de même, ce dieu des morts... Et cette extraordinaire joie chantante qui sortait d'un abîme sous mes pieds sur une place d'appel sinistre, au milieu des camps de la mort.
Il y a d'étranges choses dans la vie — peut-être est-ce la vraie vie qui passe son museau sous notre croûte fossile?
On ne sait RIEN. Mais on voudrait tellement savoir.

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4

1973


Dans cette étrange vie pas-encore, on se heurte perpétuellement à la Victoire que l'on doit remporter, comme si tous les contraires se liguaient pour vous aider à une victoire plus profonde, plus totale, et l'anti-légende pour vous obliger à incarner et matérialiser la Légende même. Et finalement, il n'y a qu'une Légende, celle de cette Terre meurtrie et asservie qui doit arracher sa joie et sa liberté à la Nuit même qui l'engloutit.
Donc, la mort est venue frapper une fois de plus à ma porte, mais d'une façon plus cruelle et plus profonde que les camps de la mort de mes vingt ans : c'était en 1973, j'avais cinquante ans tout juste. Mère, la grande Mère, était partie — il faudrait dire plutôt bâillonnée et condamnée par ces « hommes » mêmes qu'elle voulait délivrer : des assassins en blanc et impeccables. Six mois avant, on m'avait fermé la porte de Mère, moi son témoin et sa dernière communication avec le monde. Partie, celle qui avait fait ce prodigieux cheminement dans l'Avenir de la Terre, ouvert ce Passage de la prochaine espèce, et à quel prix ! C'était effrayant. La porte se refermait sur tant de secrets — sur le Secret même. Le Moyen, la façon de procéder à ce Changement de la terre : la Transformation. J'étais tout seul au milieu de cette foule, qui déjà me regardait d'un œil soupçonneux, comme si j'étais l'Ennemi de leur tranquillité « yoguique ». J'étais à peine assis, stupéfié, devant ce corps aimé, et si blanc, amenuisé par la grande douleur et l'ultime effort, à peine assis dans ce grand hall en bas, que l'un des dirigeants de la tribu me fit appeler pour traduire en français son « message » mortuaire:

«Son corps n'étais pas destiné à être le Nouveau Corps.»

J'étais horrifié. J'ai dit NON ! J'avais envie de crier. Que savaient-ils de la « destinée » de ce corps? Que savaient-ils du combat qu'Elle livrait dans son corps? Elle n'était pas morte ! Et soudain, j'avais une écrasante responsabilité sur les épaules : il y avait ce prodigieux Document, l'Agenda de Mère, cette expérience vécue pas à pas dans la Nuit de la Terre et l'incompréhension des hommes — il fallait sauver ce Document ! Il fallait dire, il fallait faire comprendre. Ils avaient tous peur de ce que je savais. Je me suis réfugié avec Sujata et les papiers de Mère dans un jardin voisin de Pondichéry. Et d'abord, frénétiquement comme si je m'attendais à mourir à n'importe quel moment, j'ai écrit cette Trilogie où j'essayais désespérément de dire le chemin de Mère : le Matérialisme Divin, l'Espèce Nouvelle, la Mutation de la Mort.
Et tout de suite, la bataille de l'Agenda s'est déclarée.
Ils étaient les « propriétaires » de Mère et de Sri Aurobindo, ils voulaient les papiers de Mère, j'avais « volé » les papiers de Mère, ils voulaient supprimer, censurer tout ce qui pouvait nuire au renom de leur saint Ashram, et surtout ils voulaient faire une nouvelle Religion de Sri Aurobindo, une grande Affaire monétaire et profitable avec des millions de disciples et des touristes —je dérangeais la belle affaire. Il y avait des Financiers tout prêts. Ils ont voulu même faire un faux Agenda dûment imprimé avec tous les moyens voulus, tandis que j'étais là à me débattre sans un sou pour faire publier purement et simplement ce qu'Elle voulait pour la terre et pour les hommes.
Ils ont même essayé de m'assassiner : trois tueurs dans des canyons près de Pondichéry — comment ai-je échappé et désarmé ces tueurs sans dire un mot, sauf cette prière dans mon âme et un regard tranquille, soudain, qui les a mis en fuite. Il y a décidément des miracles et un Destin plus grand que toutes les combinaisons humaines, et une Légende plus puissante que toutes les tueries millénaires, ici et là, sous toutes les Inquisitions et les dominations papales ou dynastiques, et peut-être même sous tous les masques démocratiques et hypocrites des « droits de l'homme » qui sont seulement les droits de prendre et de régner sur la terre, comme l'aurait rêvé Hitler mais avec une bonne mine et des slogans télévisés.
Et d'ailleurs, ce fatidique mois de novembre 1973 commençait avec la «guerre du pétrole».
Voici ce que je notais dans mes Carnets jamais publiés — ces Carnets d'une Apocalypse, que j'avais ainsi appelés parce que je sentais que c'était le temps de la « mise à nu » — de tout, et de moi-même et de la terre:

«L'avion de la Lufthansa piraté, huit otages occidentaux tués dans l'avion qui atterrit à Koweït. "Les commandos se sont mis à battre l'une des femmes otages devant le microphone ouvert (rapporte l'Indian Express du 19 décembre) et annoncèrent à la tour de contrôle d'Athènes : 'Vous pouvez entendre — cette femme va mourir.'Soudain ils ont traîné une femme devant le microphone et elle s'est mise à hurler, dit le porte-parole de la Lufthansa."»

Et dans mes Carnets du 20 décembre j'ajoute :

«Satprem à Sujata : Nous sommes entrés dans une accélération sinistre. Nous allons vers le trou... ou le commencement d'Autre Chose. L'Occident laisse battre ses femmes aux oreilles du monde entier pour avoir le pétrole des Arabes et leur vendre des armes.»
Et en date du 23 décembre 73, je note dans mes Carnets :

«Nous voyons seulement une petite carte du Grand Château de cartes s'écrouler, puis une autre, parce que nous voyons les choses jour par jour— mais tout le château s'est écroulé. C'est la fin de la Mécanique. Le monde est ruiné.
«Dans ma "note de l'éditeur" annonçant la prochaine parution de
l'Agenda de Mère, je disais : et peut-être n'y aura-t-il pas besoin de dire "nous verrons". Peut-être même cet Agenda sera-t-il périmé — et on verra que le chemin EST FAIT. D'ailleurs je me demande si nous aurons encore des machines à imprimer ! Et en Occident... essaieront-ils, dans un dernier sursaut de leur ruine, d'abattre leur poigne sur les quelques cheiks arabes qui détiennent les clefs de leur mécanique ? Alors, qui affrontera qui ?
«Lu dans
Le Monde hebdomadaire du 10 décembre à propos de la "guerre du pétrole": "En novembre 73 s'est ouverte une nouvelle ère dans l'histoire du monde."
«Ils ne savent peut-être pas qu'ils disent si bien ni à quel point.»


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5

Orphée


Cette tombe inacceptable.
Ce premier soir-là, tandis que le ciment du couvercle n'était pas encore sec ni posée la dalle de marbre gris, debout devant ces deux corps, Mère et Sri Aurobindo côte à côte et réunis dans la mort, quelque chose de si profond a jailli de mon être, comme une détermination farouche :

ON VA LA TIRER DE Là.

Le « gardien » de Mère (ou son geôlier plutôt) faisait les cent pas derrière moi.
Non, je n'étais pas Anubis, hélas, et je n'avais pas le pouvoir de ressusciter mon Isis, mais
quelquefois j'aurais souhaité être Orphée, avec sa lyre aussi, comme Anubis, qui pouvait enchanter même les bêtes sauvages et qui sut enchanter même Hadès, le dieu des Enfers, et reçut la permission d'aller chercher son Eurydice au fond de la mort... à condition qu'il sorte des enfers devant elle, sans se retourner pour la voir encore. Mais il oublia la condition, et il s'est retourné pour la voir, et il perdit son Eurydice à jamais.
Souvent je me suis demandé pourquoi cette condition.
Orphée, c'était au VIe siècle avant notre ère barbare.
Ce premier soir-là, seul avec Sujata, j'étais devant le terrible POURQUOI.
C'est étrange comme devant ce moment Nul, ce terrible Rien qui se déchire comme du fond des temps, comme du fond de mille morts jamais consolées, quelque chose de si puissant jaillit, comme le Pouvoir même du monde, comme la Semence dorée de cette terre — ça n'a pas de mots et tout est dit et SU. Peut-être que cela aurait un chant et une Musique comme celle d'Orphée? mais ces notes, sublimes et immenses comme le roulement de la mer, n'ont pas de langage, ou pas encore. C'est peut-être le premier langage du monde avant qu'il ne naisse à sa peine et à ses morts.
J'avais tous ces assassins à mes trousses.
Et je savais qu'Elle n'était pas morte.
La tirer de là, comment?
Dans mon cœur déchiré et du fond de mon corps mis à nu, c'était comme si j'allais à la poursuite de Mère, sans pouvoirs occultes et sans rites, même sacrés et égyptiens — sans connaissance ni rien, sans musique non plus, sauf le cri de mon cœur et cette volonté farouche jaillie de la Mort même. J'allais la retrouver pas à pas et dans la Nuit, qui était la Nuit même du monde, j'allais suivre ses traces et retrouver son chemin, qui était celui même de Sri Aurobindo, tous deux cueillis par la mort ou poussés dans la mort par leurs propres disciples — mais cette fois-ci, on vaincra et ce sera la Victoire de la Terre, la délivrance de cet horrible règne du Mensonge, ce sera la Vie enfin. C'est dans mon propre corps que je la tirerai de là, en allant au fond du Trou des hommes, et, forcée par ma prière et mon amour, Elle reviendra triomphante sur une Terre vraie et neuve.

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6

Les Vieux Dieux


Mais en attendant, le dehors de la terre était aussi nocturne et menaçant... qu'il l'a toujours été depuis des siècles. Sri Aurobindo, le Voyant, celui qui avait tout vu et su dans le fond de son corps mis à nu, celui qui aimait la Terre comme la Grande Mère elle-même, disait en mai 1916, au milieu de la Première Guerre mondiale:

«Les vieux dieux ne sont pas morts, le vieil idéal de la Force dominante qui conquiert, qui règne et "perfectionne" le monde est encore une réalité vitale et n'a pas lâché sa poigne sur la psychologie de la race humaine. Et non plus, il n'est pas du tout certain que la Guerre actuelle ait détruit ces forces ni cet idéal, car la Guerre a été décidée par la force qui affronte la force, par l'organisation qui triomphe de l'organisation, par l'utilisation supérieure, ou en tout cas plus efficace, des armes mêmes qui faisaient le vrai dynamisme de la grande Puissance Teutonique agressive. La défaite de l'Allemagne par ses propres armes ne suffirait pas à détruire l'esprit qui, alors, s'incarnait en Allemagne ; elle aboutirait probablement à une nouvelle incarnation du même esprit, ailleurs, dans une autre race ou un autre empire, et il faudra, alors, recommencer une fois de plus toute la bataille. Tant que les vieux dieux sont vivants, il ne sert pas à grand-chose de briser ou d'abattre le corps qu'ils animent, car ils savent fort bien transmigrer. L'Allemagne a abattu l'esprit napoléonien en France, en 1813, et brisé les restes de l'hégémonie française en Europe en 1870 ; cette même Allemagne est devenue l'incarnation de ce qu'elle avait abattu. Le phénomène peut aisément se renouveler à une échelle plus formidable.»

Et dans l'un de mes écrits, je notais : «1940 a passé aussi, et cinquante ans après, ou bientôt
un siècle après, les vieux dieux sont toujours là, plus formidables que jamais — plus hypocrites que jamais et plus innombrablement incarnés sous une peau blanche ou noire ou jaune, sous de respectables chapeaux et barbes diverses et de respectables slogans dans toutes les langues du monde, mitraillette à la main. » Tranquillement, en 1919, Sri Aurobindo disait:

«C'est la halte temporaire d'une inondation en marche.»

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7

L'Inondation


Mais ce que nous ne savons pas, c'est que l'inondation est double.
Il y a cette crasse mondiale et cette corruption dont le pire n'est pas celle des politiciens et des financiers véreux qui jonglent avec les richesses du monde — un monde ruiné et véreux —, mais la corruption des consciences : plus personne ne voit clair, ou ceux qui voient se taisent, c'est le vrai-faux ou le faux-vrai partout. Les économistes de ma jeunesse estudiantine disaient : « La mauvaise monnaie chasse la bonne. » Elle est partout chassée, et les faux gourous et charlatans divers ont fermé
la bouche à ceux qui pourraient dire encore un peu de vérité.
Mais — il y a encore un mais sauveur —, sous cette inondation de crasse nauséeuse, il y a une imperturbable inondation dorée qui monte et monte, il y a les formidables Portes ouvertes par Sri Aurobindo et par Mère dans la nuit même de la Matière, dans cet Inconscient de la première matière de nos milliards d'années, ce sommeil de roche qui s'est éveillé enfin et qui pousse dehors, régurgite, pourrait-on dire, toutes ces couches et ces couches géologiques et animales, tout ce monde fossilisé dans sa nuit inconsciente, et qui a produit toutes sortes de pattes et d'antennes, dont la dernière, de notre homme mental, croit tout savoir et tout dominer par sa mécanique « intelligente », mais qui est en train de se détruire elle-même et de s'engloutir sous ses « découvertes » mortelles et suicidaires. Mais l'autre marée monte, et monte inéluctablement, invinciblement comme la poussée même de cette Évolution, jusqu'à ce que la dernière goutte de toute cette décomposition et ces détritus millénaires et le dernier décibel de notre vacarme soient sortis et fassent place libre et nette pour la Terre Nouvelle et la Vie enfin qui était enfouie dans ce Roc de fond, dans cette Semence première de tous nos Âges. L'inondation divine est en marche.

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8

Sur la Piste de Mère


Très vite, nous avons compris qu'il fallait se cacher. Une espèce nouvelle, un être nouveau est un intrus dangereux pour la vieille espèce. Nous sommes même allés, Sujata et moi, chercher une île dans le Pacifique, et nous en avons trouvé une — minuscule et hors des cartes, Alofi à quelque 20° de longitude sud. Très vite aussi nous nous sommes aperçus que c'était bon pour les habitants de la vase et les touristes, et comme nous marchions et marchions de long en large, une habitante des lieux m'a dit : « Vous allez fatiguer vos jambes » ( ! )
Moi, je voulais marcher.
Nous avons enfin trouvé un lieu mythique que nous avons appelé « l'île de Mère », hors de tous les Pacifiques qui ne sont plus pacifiques du tout.
Et j'ai marché dans l'Avenir de la Terre. J'ai suivi la piste de Mère à travers la tombe — des tombes et des tombes sans fin comme si tous les morts étaient là. « Les morts tuent le vivant », disait déjà Eschyle quatre siècles avant notre ère. Et en effet, dès le premier pas, ils vous sautent dessus et ils veulent vous faire croire que... Dès qu'un premier souffle de la Vie nouvelle veut entrer là-dedans, c'est comme une émeute générale : mais c'est la Mort qui entre ! Tu vas mourir. Et dans tous les organes un à un, et avec une minutie savante, et un pouvoir hypnotique presque terrifiant, il faut faire face et traverser un millier de petites fausses morts — comme si tout le Souffle de la Vie, la vraie Vie, devait entrer de force et innombrablement dans toutes les cavernes du corps et jusqu'au dernier souterrain : « jusqu'au dernier atome », disait Sri Aurobindo. Et cette Puissance écrasante, nouvelle, inconnue, qui pilonne et pilonne cet abominable magma corporel, comme si l'on allait être démoli de fond en comble — mais c'est la Forteresse du moi mental, humain, qui est démolie, brique par brique et dalle par dalle, et peut-être même toute la Forteresse de la vieille espèce retranchée dans sa fausse Science et son Ignorance abyssale, avec tous ses prêtres et ses dogmes scientifiques ou religieux, car où s'arrête la Matière? Y a-t-il un coin de matière que l'on puisse isoler du reste? Les virus passent partout très bien, mais il y a peut-être un implacable Virus Divin qui est en train de traverser nos murs et qui veut nous obliger à être... ce que nous sommes.
Alors, on démonte pièce par pièce et rouage par rouage toute la mécanique de la Mort, le fameux « mais je pense donc je suis », qui est seulement « je pense la mort donc je vis la mort, et je la fabrique ». Une formidable Forteresse. Pour s'apercevoir au bout (mais où est le « bout » ? ça semble sans fin) et peu à peu, mais si peu que c'est comme rien, comme un atome jour par jour, et si long que c'est comme un siècle tous les jours, jusqu'à ce que, finalement, une sorte d'évidence cellulaire s'établisse au fond de « tout ça », quelque chose d'indéracinable comme un premier « quelque chose » au monde qui ne sait rien et qui sait quand même et qui vit comme depuis toujours et pour toujours — c'est évident, c'est tout, et c'est partout, et c'est merveilleusement Divin, enfin c'est ça qu'on aime et qu'on respire. Tout le reste... mais ce « reste »-là, il occupe encore la vieille carcasse et il vous entoure ou vous cerne de tous les côtés avec la vieille espèce « comme d'habitude ». Cela fait, étrangement, comme deux corps l'un dans l'autre, deux vies l'une dans l'autre, la vie et la mort côte à côte, l'invulnérable et le suprêmement fragile côte à côte, l'éternel et le temps qui passe côte à côte, le présent et l'avenir dans une même peau, l'ici et le là-bas — la Victoire, impérieuse, inéluctable, et en même temps un terrible point d'interrogation qui est comme l'interrogation du monde, sa question de vie ou de mort.
C'est une difficile coexistence — ou cohabitation.
Mais alors on comprend, on vit cellulaire-ment et aveuglément avec d'autres yeux qui n'ont pas encore de vocabulaire ni tous les dictionnaires des hommes : l'Évidence est sans mot, elle pourrait chanter peut-être comme ce vieux condamné sur une place d'appel dans les camps de la mort tandis que cet abîme de Tendresse s'ouvrait sous ses pieds. Incompréhensible abîme. Mais maintenant mes abîmes sont ouverts et je « comprends » par un million et un milliard de cellules ce que Sri Aurobindo disait, dé-couvrait il y a tant de décades:

«Dans chaque particule, CHAQUE ATOME, chaque molécule, chaque cellule de la Matière vivent et œuvrent, inconnues, toute l'omni-science de l'Éternel et toute l'omnipotence de l'Infini*.»

*J'ai tenté de dire cette expérience et cette dé-couverte presque jour par jour dans mes Carnets d'une Apocalypse.

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Deux Corps


Deux corps l'un dans l'autre...
Et cela n'a pas cessé de grandir, de s'intensifier et de brûler, oh ! ce Feu, dans cette vieille peau de singe. C'est une masse vibratoire plus dense que tout ce que l'on connaît aux frontières de la Matière, comme de l'Énergie qui va tourner en matière ou de la matière qui va se volatiliser en énergie. Qu'est-ce qui va se passer? Comment contenir tout ça? On est perpétuellement comme au bord de... de quoi? Comme un abîme qui voudrait déboucher de l'autre côté de son abîme — mais c'est un abîme terrestre, et ils dansent là-dessus, ils pérorent, ils électronisent, comme des petits pantins d'une ancienne création, comme de vieux hippocampes sous les eaux qui n'ont encore jamais respiré le soleil. Et de l'autre côté... c'est quoi? personne ne le sait, on le sait seulement quand c'est fait, quand le dernier rocher du fond de l'abîme a fait éclater son grand air et son soleil et sa Vie neuve, quand quelques vieux ichtyoïdes ont suffisamment étouffé sous les eaux noires et laissé pousser, lentement pousser, quelques cellules brûlantes, appelantes, criantes, alors... Alors c'est , c'est tout-là, il n'y a pas de « formule » de l'espèce nouvelle ; la formule, elle est toute dedans et depuis toujours ; c'est la première Semence de toute cette histoire mortelle et embrouillée qui poussait-poussait, pressait pour trouver son grand Soleil et sa Vie enfin et sa fleur d'Amour et de Tendresse. Et combien de morts il fallait, combien de catastrophes fructueuses pour frapper à la dernière Porte.
Et ils vont chercher ça au ciel !
Deux corps l'un dans l'autre... Voilà vingt-cinq ans que je suis sur la piste de Mère (ou était-ce deux mille cinq cents ans), et ça pousse, ça grandit, c'est une espèce d'impossibilité de chaque jour ou chaque seconde et c'est quand même Possible, c'est une espèce de Miracle mine de rien, et on ne sait rien, et pourtant ça SAIT imperturbablement, obstinément au fond de ces millions de cellules — ça VEUT. C'est comme un amoureux qui cherche sa Bien-Aimée et qui n'aura de cesse qu'il l'ait trouvée. Il y a un Orphée en nous qui cherche son Eurydice à travers toutes les morts et les défaites. Mais il ne doit pas se retourner... Elle est devant ou tout au fond, de l'autre côté des tombes, dans la Légende de l'Avenir, et c'est Elle qui nous fait devenir ce que nous devons être pour l'embrasser dans un corps et nous désaltérer à ses lèvres.

Je sais, o Dieu

écrivait Sri Aurobindo en 1913

qu'un jour poindra enfin
où l'homme se réveillera et,
laissant ses jouets de boue,
prendra dans ses mains
le soleil et les étoiles
et remodèlera les apparences,
les lois et les formules d'antan.


Et les cieux en pâliront. Et pourquoi donc cette Terre aurait-elle été faite?
Il y a un poète bengali (Tagore pour ne pas le nommer) qui disait dans sa langue chantante ce que l'Inde a toujours su depuis des millénaires d'avant Isis (nous traduisons à peu près dans notre langue grammaticale) :

«Sans nous,
qu'est-ce que le Seigneur aurait à aimer,
seul dans son paradis !
C'est ainsi qu'il fit ces millions de créatures
pour avoir la joie d'aimer...
innombrablement.»


Mais qui s'aperçoit de sa joie et de son amour? qui s'aperçoit de ce qui est ? — C'est Lui qui aime Lui ! C'est Lui qui tâtonne vers Lui... à travers combien d'âges?
Même dans la pierre Il est là, disait le Véda.
Même la Matière est de la substance de l'Éternel, disait Sri Aurobindo.
Ils aiment mieux les dieux crucifiés et les paradis de la Mort.
Mais quand on commence à s'apercevoir de ce Toi qui est là, dans un million et un milliard de petites cellules, et dans tout ce qui est autour, c'est un émerveillement et un Sourire au fond, une émotion si profonde, et un Plein, et une Musique qui commence, comme une mer qui se roule dans son propre délice. Et tout se refait à chaque seconde, les âges et les petites libellules qui passent.

«L'ère des religions est passée»

disait Mère. C'est le temps des chercheurs. L'aventure de la deuxième vie.

7 décembre 98


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Легенда Будущего

У меня была прекрасная Тайна.
Или Сокровище.
Это было как в конце эры.
Я знал то, что освободило бы Землю от её железных или свинцовых тысячелетий: Победа над Смертью, так как именно Смерть царит, мы - мёртвые, находящиеся здесь или там, и именно Смерть устанавливает все наши законы и создаёт все наши катехизисы, научные или религиозные, в зависимости от того, кем она является - но мы не являемся ими. Нас ещё нет. Мы - продукт окаменелостей с чем-то внутри, о котором мы не знаем. Нас ещё нет. Мы на последнем этапе Эволюции мёртвых, которые возрождаются без конца, чтобы узнать, кто же они на самом деле. Жизни никогда ещё не было - она где-то внутри или внизу, и именно она растёт и растёт без передышки, безжалостно, чтобы нам обязательно найти, обнаружить то, что там, внутри или внизу, без катехизиса, без небесного рая и супермашин, которые найдут для нас то, чего мы не нашли, которые покроют новым доисторическим и животным слоем то, что там, внутри или внизу. История не началась, её ещё не было. Человек не начался: мы - научные или религиозные гуманоиды в переходе — в нескончаемом переходе к тому, чем мы должны стать: другим, новым, неизвестным и действительно человеческим видом, который не будет больше производить улучшенные окаменелости и растущие кладбища, как если бы не существовало больше ничего, кроме них, всё более возрастающих на нашей смертельной планете, которая умудряется улучшать Смерть вместо того, чтобы найти то, что скрыто там, внутри или внизу — Власть, которая изменила бы всё, включая человека.

«Человек - переходное существо»

- сказал Шри Ауробиндо в начале этого века.

«Спасение является физическим»

- сказала Мать в середине этого века.

И мы идём из катастрофы в катастрофу и из развалин в развалины через тысячелетия, вынуждающие нас открыть единственную Дверь, которую мы не открыли, внутри или внизу. Как если бы этот вид или эта цивилизация не нашли ключ, который открыл бы всё, чтобы всё изменилось, и снова другой вид, и снова другая "цивилизация", и снова развалины... и так всегда? Но что-то, что растёт и растёт, внизу и внутри — неумолимо. Нет ничего более неумолимого, чем Эволюция или чем молодой росток в чаще леса, который хочет вырасти в своё Дерево и который умрёт столько раз, сколько нужно, и будет пользоваться всем мусором, всеми разложениями старых умерших организмов, чтобы вырваться, наконец, на свет и в свободном пространстве раскрыть свой единственный цветок.
Будут ли нам нужны ещё мёртвые и их растущие кладбища, чтобы найти то, чем мы являемся, и нашу собственную Власть? Но наша планета угрожает стать только великим Кладбищем, с гномами или супер-гномами с их химическими и генетическими махинациями. Но где "ген" внутри, или внизу, то-что-порождает — это Смерть порождает себя саму, чтобы смочь жить и родить мёртво-живых малышей... и так всегда?
Есть ли у нас ещё время произвести другой вид — и что это за вид, который не производится больше из старых окаменелостей? какими средствами? Еще одной катастрофой?
Но она уже угрожает стать всемирной.
Мы в конце эры. И это справедливо.


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